Nous voici au troisième billet consacré à la thématique du surpoids, après avoir envisagé le premier pas indispensable lorsque l’on s’engage dans une démarche de perte de poids à long terme, et les possibles freins psychologiques à cette dernière.
Si les deux précédents articles nous ont fait voyager aux confins de notre histoire familiale ou personnelle, ont questionné notre rapport au cadre sociétal, culturel et médical dans lequel nous évoluons, celui-ci nous ramène sans transition…aux intestins, et à la charmante (…ou moins charmante) population que ceux-ci hébergent : des milliards de bactéries, champignons, parasites et autres bébêtes que l’on regroupe sous le terme « microbiote ».
Je vous accorde que le sujet est un peu moins séduisant au premier abord, mais sans comprendre ce qui suit, la perte de poids peut réellement être compromise, ou détériorer l’état de santé de celui ou celle qui l’entreprend.
Suivant les plaintes et symptômes présentés par la personne qu’il accompagne, le naturopathe travaillera sur l’un, mais plus généralement sur chacun des axes suivants :
- l’assainissement du microbiote et le traitement des infections fongiques, qui peuvent par exemple être en lien direct avec des troubles du comportement alimentaire;
- la restauration d’une membrane intestinale saine et idéalement perméable, afin notamment d’éviter que la perte de poids -et l’élimination des substances piégées dans les cellules adipeuses- intoxique l’organisme;
- la diversité de la flore intestinale (la flore intestinale des personnes en surpoids est généralement pauvre en certaines bactéries, qui favoriseraient le contrôle du poids).
Voyons cela un peu plus en détail…
Compulsions sucrées et troubles du comportement alimentaire signent parfois la présence d’un hôte microscopique en abondance : le candida albicans
Le candida albicans est le plus commun des champignons microscopiques qui vivent normalement en saprophyte -en harmonie- dans l’intestin. Tant que sa prolifération est maîtrisée, il participe à l’équilibre du microbiote. Dans certaines conditions toutefois, il se multiplie de façon incontrôlée et peut envahir tout l’appareil digestif, et même se propager dans tout l’organisme.
Les principales causes du développement du candida albicans sont l’usage répétitif d’antibiotiques, les traitements à base de cortisone, la pilule contraceptive, une alimentation trop riche en sucres ou trop industrielle,…
Ses principaux signes s’expliquent par les nombreuses substances toxiques émises par le candida albicans (dont l’acide tartrique impliqué dans la production d’énergie, des substances neurotoxiques ou perturbant la production de neurotransmetteurs,…):
- une fragilisation de la muqueuse intestinale se traduisant par des inconforts, ballonnements, troubles du transit, constipation ou tendance à la diarrhée, intolérances alimentaires,…
- des infections urinaires ou gynécologiques à répétition, des mycoses
- une fatigue inexpliquée, pouvant devenir chronique
- des troubles du comportement alimentaire, et tout particulièrement une attraction pour le sucré, les pâtes, le pain,…
- des troubles psychiques : anxiété, irritabilité, troubles du sommeil
- des perturbations du système immunitaire
- …
Tant que cet hôte prolifère au sein d’un organisme en surpoids, il sera très difficile d’inscrire une perte de poids dans la durée, car le champignon est très capricieux et exige vicieusement sa « liste de courses » (qu’il adresse sous forme d’envies compulsives) dans la catégorie des aliments qui font grossir. Pour le réduire au silence et lui faire retrouver sa place normale, quelques mois de traitement en micronutrition seront nécessaires -raison pour laquelle il est vivement conseillé de se faire accompagner par un praticien de santé-, ainsi que le rééquilibrage de l’assiète vers les céréales complètes, les légumes riches en fibres, de bons lipides,…
Chouchouter l’intestin pour que la perte de poids n’intoxique pas l’organisme
La bonne étanchéité des graisses est une caractéristique que l’organisme utilise intelligemment en y stockant les substances toxiques qu’il ne parvient pas à éliminer. Une réserve graisseuse peut ainsi être pour le corps un rempart salutaire, le moyen de se protéger des effets toxiques de toute une série de substances ingérées (résidus d’engrais chimiques et de pesticides, additifs et colorants de synthèse, métaux lourds, excipients indésirables de médicaments ou de compléments alimentaires de qualité non naturelle,…) ou assimilées par voie cutanée ou respiratoire (cosmétiques, parfums de synthèse, polluants athmosphériques,…).
Lorsque le rééquilibrage alimentaire (nous en parlerons plus amplement dans le prochain billet dédié à cette thématique) permettra à l’organisme de déloger petit à petit les graisses, il sera essentiel que l’organisme puisse gérer les toxiques qui seront libérés de celles-ci. Une perte de poids trop rapide ou non préparée de ce point de vue peut devenir une véritable bombe chimique dont les organes et cellules ne sortent pas indemnes.
C’est pourquoi avant même d’envisager la perte de poids, on s’assurera que les parois intestinales sont bien à même d’acheminer les déchets éliminés vers la sortie, sans relarguer ceux-ci au travers de muqueuses trop poreuses. Dans cette perspective, en combinaison éventuellement avec une lutte contre le candida albicans évoqué ci-dessus, on remplacera dans l’assiète les autres grands corrosifs de la paroi intestinale (gliadine du gluten, caséine du lait, aliments raffinés) par des nutriments qui en favorisent la régénération. Rien de plus salutaire à cet égard qu’un bon bol quotidien de bouillon « façon grand mère » (bouillon dans lequel ont mijoté durant au moins 5 heures des morceaux de viande avec os et peau -tels des pilons ou ailes de poulet, voire simplement la carcasse-, avec un tout petit verre de vinaigre de cidre). Les substances libérées lors de la cuisson prolongée du bouillon (glutamine, chondroïtine,…) permettront à l’intestin de trouver les nutriments essentiels à sa régénération. Un soutien micronutritionnel et phytothérapeutique peut également accompagner cette étape de reconstruction de l’intestin.
Dis-moi quelles bactéries peuplent tes intestins, et je te dirai comment tu te portes
« Avec plus de cent mille milliards de bactéries (dix fois plus que le nombre de nos cellules), des gènes bactériens cent cinquante fois plus nombreux que les gènes humains, un poids moyen de 1,5kg, une capacité à influencer notre métabolisme, notre système immunitaire, et à communiquer avec notre cerveau, le microbiote est depuis quelques années considéré comme un organe à part entière, au même titre que notre coeur, notre pancréas ou notre foie »
Marion Kaplan et Alma Rota, Power Biotique, Guy Trédaniel Editions, 2018
Nous avons évoqué ci-dessus un hôte particulièrement indésirable de notre monde intestinal lorsqu’il prend trop de place. A l’inverse, certaines bactéries tout à fait désirables peuvent être insuffisamment représentées dans le microbiote. On nomme ces bactéries désirables les probiotiques (« qui favorisent la vie »). Petit rappel au passage, les antibiotiques (« contre la vie ») ravagent sans distinction la flore pathogène et la flore bénéfique. Raison pour laquelle, après leur passage, le candida albicans a le champ libre pour se déployer.
Les études relatives aux probiotiques et à leurs bienfaits ne se comptent plus (près de 66.000 publications en 20 ans selon le Laboratoire Copmed*). Toutes confirment et documentent la symbiose entre le microbiote et l’organisme. Cette microflore intestinale constitue la première couche de protection de la barrière intestinale, participe à l’immunité, à la digestion, à la sécrétion de vitamines, à la synthèse de neurotransmetteurs et…au contrôle du poids.
La flore intervient en effet également dans le métabolisme des sucres et des graisses et joue un rôle dans la régulation de l’appétit. Les flores intestinales moins riches en bifidobactéries ont tendance à épargner l’énergie et donc à favoriser la prise de poids ; les flores intestinales plus riches en bifidobactéries favorisent au contraire la dépense énergétique et la perte de poids. On observe également chez les personnes en surpoids une hausse des bactéries firmicutes et une baisse des bacteroidetes.
Rééquilibrer durablement la flore intestinale dans le cadre d’un accompagnement par un praticien avisé et d’une alimentation « vivante » peut ainsi s’avérer bien plus efficace que n’importe quel régime.
*Formation "Homéostasie intestinale" à l'attention des praticiens de santé, Dr Vincent Renaud, 2019/2020